Extrait

2.

Louis Armstrong

18 Avril 1976

En ce dimanche soir, Bradley et Brigitte se sont préparé un petit repas en tête à tête.

Nouvellement emménagés dans cette maison qu’ils viennent d’acheter, le jeune couple d’amoureux veulent fêter Pâques à leur manière.

S’étant mis sur son trente-et-un, Bradley a revêtu sa plus belle chemise, un pantalon bien repassé et ses plus beaux souliers vernis. Soucieux de lui plaire, il s’est peigné en rabattant sa chevelure vers l’arrière et s’est parfumé le cou de la meilleure eau de Cologne qu’il pouvait connaître, celle que même Elvis porte pour faire succomber ses fans : BRUT.

Affairée à la cuisine, Brigitte a mis la table : une nappe d’un vert étincelant, des assiettes aux bordures dorées et des chandelles allumées et disposées au centre.

Habillée d’une petite robe blanche et exhibant ses magnifiques jambes, elle a coiffé ses cheveux longs et blonds à la dernière mode comme Brigitte Bardot.

Mitaine de four à ses mains, elle ouvre le four afin d’y déposer sa cocotte dans laquelle elle a cuisiné sa recette parfaite de bœuf bourguignon.

Au salon, Bradley s’est agenouillé sur le tapis à poils long, parcourant de ses doigts, les vinyles remisés dans le meuble télé.

Agrippant celui qu’il cherche, il le sort soigneusement de sa pochette et se dirige au tourne-disque.

Relevant la tête, il dépose le vinyle sur le plateau avant de déposer délicatement l’aiguille sur l’œuvre musicale.

Actionnant l’interrupteur, un bruit blanc retentit de par les haut-parleurs alors que le disque se met subitement à tourner.

Momentanément perdu dans ses pensées, Bradley sourit lorsque le pianiste, valsant ses doigts sur ses touches, se fait entendre sur cet air de Louis Armstrong.

« I see trees of green, red roses too, I see them bloom for me and you. And I think to myself : what a wonderful world… « , chante Brigitte, coupes de vin à la main, en entrant sensuellement dans le salon.

Sourire

– Est-ce la voix d’un ange que j’entends là ? demande Bradley, flatteur, en se retournant.

S’avançant vers lui, Brigitte, sourire aux lèvres, lui tend la coupe de vin.

– Tu dis cela que pour me faire plaisir.

Sourire

Prenant une gorgée, Bradley l’agrippe par la taille en la pressant tout contre lui.

Valsant au gré de la chanson, leur regard scintillant de désirs, les tourtereaux profitent de l’instant présent alors que la trompette continue son hymne.

– Pour moi, tu as la plus belle voix du monde, c’est ce qui compte, lui murmure Bradley.

Sourire

– Je vous aime, officier, Dave Bradley, lui souffle-t-elle, en entre-lassant ses bras autour de son cou.

– Inspecteur Dave Bradley, répond-il, à la blague d’un ton hautain. I-n-s-p-e-c-t-e-u-r, madame la professeure.

– Ah oui, c’est vrai, vous avez été promu, dit-elle avec un large sourire. Quoi qu’il en soit, vous êtes le meilleur à mes yeux, c’est ce qui compte.

Sourire

Alors que le tourne-disque continue de jouer sa douce mélodie, les amoureux, seuls dans le salon, dansent fusionnés, leur corps en symbiose.

– Crois-tu que nous serons heureux ici dans cette maison ? demande Brigitte, le regard rêveur.

– Je nous le souhaite, mon amour… Je nous le souhaite. Tu as trouvé un bon emploi à l’école, je viens d’être promu au commissariat et comme si cela n’était pas suffisant, voilà que nous achetons cette magnifique demeure… Je crois que l’avenir nous réserve de bien magnifiques choses. Ne crois-tu pas ?

– Du moment que je suis avec toi, lui répond-elle en le regardant dans les yeux. J’irais au bout du monde.

Sourire

– Moi aussi…

Sourire

– Que dirais-tu de fonder une famille ? demande Brigitte, rêveuse.

– Tu es sérieuse… Tu aimerais un bébé, là ?

Sourire

– Je crois que, oui. C’est peut-être précipité. Je… Je… Pardonne-moi, je ne voulais pas…

Sourire

– … Ne t’excuse pas, mon amour… C’est vrai que nous n’en avons pas parlé, mais… oui ! Oui ! L’idée me plaît… Un petit Dave qui va courir partout dans la maison, qui va m’appeler papa. Ouais, l’idée me plaît… Avec toi, je le veux.

Dans un silence évocateur, plongée au fond de son regard, Brigitte tente de voir à travers lui, toute la sincérité de ses mots et la profondeur de son âme. Puis, dans un sourire éclatant dessiné sur ses lèvres, Brigitte répond :

– Tu es sérieux ? Tu ne blagues pas Dave, n’est-ce pas ? Tu aimerais réellement que l’on essaie ?

Sourire

– Non, Brigitte, je ne blague pas… Si avoir un enfant te plaît, alors je suis partant, oui ! répond-il en la soulevant de terre et en tournoyant sur lui-même.

Rire

Puis, lentement, alors qu’elle rit aux éclats, Bradley la repose sur terre, la faisant glisser tout contre son corps jusqu’à ce que ses lèvres touchent les siennes.

Dans un baiser passionné, l’inspecteur lui caresse tendrement les cheveux et, avant de se glisser sous sa robe, lui murmure ces mots :

– J’irai jusqu’en enfer pour toi…

– Ah, Dave ! lui souffle-t-elle avant de l’embrasser.

Ses mains parcourant son corps, elle agrippe son postérieur alors que son sexe durcit se presse tout contre elle.

Alors que Louis Armstrong termine son solo de trompette, les amoureux se retrouvent confortablement couchés sur le tapis à poil long du salon.

 » …and I dream to myself… What a wonderful world… » chante avec le sourire Louis en terminant sa chanson.